A 6088 m d’altitude : Le Huayna Potosi

« L’alpiniste est un homme qui conduit son corps là où, un jour, ses yeux ont regardé… « 

Gaston Rébuffat

« En fait l’alpinisme, c’est super simple, il suffit de mettre son pied gauche devant son pied droit, puis l’inverse, et ainsi de suite jusqu’en haut …»

Après avoir passé quelques temps en Bolivie, ce qu’on peut en retenir, c’est que c’est un pays très haut. En effet, La Paz est la capitale la plus haute du monde, l’aéroport El Alto est l’aéroport le plus haut du monde, le  Titicaca est le lac le plus haut du monde, bref, tout et n’importe quoi qui appartienne à la Bolivie est assez rapidement classé « Plus haut du monde » ! C’est ainsi que nous nous sommes dit avec Véro (qui nous avait rejoint pour quelques jours), qu’il était bête de ne pas profiter de l’occasion pour s’initier à l’andinisme (c’est comme l’alpinisme, mais dans les andes).

Après avoir fait le tour de toutes les agences, nous avons retenu le Huayna Potosi comme première expérience. Réputé « 6000 le plus accessible du monde », il est situé à 25 km de La Paz, et culmine à une altitude de 6088 m. Côté Peu Difficile+, il est le sommet le plus gravi aux alentours de La Paz, et ne représente pas de difficultés particulières. Malgré cette cotation, il ne faut pas perdre de vue que 6088 m, c’est plutôt haut. 1278m plus haut que le Mont-Blanc, 446m plus haut que le mont Elbrouz (plus haut sommet d’Europe, et non ce n’est pas le Mont Blanc), ça fait une sacré hauteur, et il ne faut pas sous-estimer le mal d’altitude.

Le sorroche n’est pas à prendre à la légère. Il a tout de même couché mes deux partenaires d’ascension (Véro et Pedro), malgré que pour ce dernier on suspecte tout de même pas mal la truite qu’il a mangé au premier jour. Bref, voici le résumé des 3 jours d’ascension vers le sommet :

Jour 1 : Acclimatation et entrainement sur glacier

Départ de la Paz, 1 h de route jusqu’au camp de base, sur fond de musique chicha. Si tu ne connais pas la musique chicha, tu rates quelque chose de fantastique. Prends le haut parleur le plus explosé que tu connaisses et met à fond cette chanson afin de rattraper tes lacunes. Et fais le tout de suite c’est un ordre !!

Arrivée au camp de base vers 10h, repos puis vers 14h entrainement sur glacier. L’entrainement dure 2h, et il permet de grimper un mur de glace à coups de piolets et de crampons, comme les vrais durs de Vertical Limit.

Il permet aussi de voir comment le corps réagi face à l’altitude sous le coup de l’effort. Puis retour au camp de base. Ce refuge est géré par une ancienne cholita escaladora.Les cholitas escaladoras sont un groupe de cholita, qui ce sont données pour défis d’escalader les plus haut sommets de la Bolivie, en costume traditionnel. Elles organisent aussi différentes actions, comme par exemple, de guider des expéditions formées de femmes des guides de montagne, vers différents sommets boliviens. En effet, être guide de montagne n’est absolument pas un métier reconnu dans la société bolivienne, et les femmes de guide se plaignent souvent que leurs maris passent leurs temps à se ballader dans la montagne pendant qu’elles font tout le travail. Ces cholitas leur apprennent donc l’effort et la rudesse des conditions de travail de leurs maris.

Jour 2 : Du camp de base (4620 m) au camp haut (5130 m) :

Repos jusque 14h. C’est l’occasion de voir les groupes de la veille redescendrent après une longue nuit d’escalade vers le sommet, et de faire monter d’un cran la tension. Un peu plus de la moitié ont atteint le sommet. Les autres sont soit restés au refuge, soit redescendus, par faut e du mal d’altitude. L’un d’eux à même fait un petit coma de 5 mn à 5800m. De quoi se rassurer.

Puis, c’est l’ascension jusqu’au refuge d’en haut (campo alto). Les sacs sont très alourdis par tout le matériel (sac de couchage -20°C, piolets, crampons, vêtements isothermes, baudriers …). L’ascension dure entre 2 et 3h, fonction de rythme de groupe. Durant l’ascension, les premiers symptômes d’altitude commencent à se faire sentir. Picotements dans les orteils, les talons et le bout des doigts, léger mal de crane, et fatigue. Passage par la cabane du gardien du parc du Huayna Potosi (20 bolivianos l’entrée), et arrivée au campo alto vers 16h. Gouter et dîner rapide, car il faut se coucher vite.

L’ascension débute à minuit, car le soleil du jour verglace le  versant de la montagne à gravir, rendant difficile et dangereuse la descente. Il faut donc être à la cime pour voir le point du jour, redescendre vite durant l’aube, afin d’être hors de la neige lorsque le soleil commence à taper.

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Jour 3 : Du camp haut à la cime (6088 m)

Reveil donc à minuit avec un bon gros mal de crâne, Vero décide de rester au camp haut, car elle souffre de gros maux de tête. Elle n’arrive pas à se lever et restera couchée jusqu’au petit matin. J’avale un Daffalgan, m’équipe, allume ma frontale et c’est parti pour l’ascension. Il est 0h30, il fait noir, environ -12°C, plein de vent, et je grimpe avec un canadien tout frais tout pimpant. Il me dit que dans son pays, cette température est tout à fait acceptable et qu’il ne voit pas du tout où est le problème. Nous commençons l’ascension, et voici la plus belle photo que j’ai réussi à prendre durant la montée.

On monte doucement, puis 5h30 plus tard, c’est le sommet. De là, on contemple les lumière d’El Alto que l’on voit en contrebas, on attends le jour en grelottant, et lorsqu’il se lève enfin, on réalise l’intérêt de tout cet effort. En effet, si la montée n’offre pas de jolie vue, la descente elle, s’effectue dans un univers merveilleux. Les panoramas et la lumière sont délirantes, et pas grand-chose ne peut exprimer la sensation ressentie. C’est quelque chose de très grand et de très blanc.

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On redescend en courant (1h30) vers le camp haut, on y boit un thé, puis on redescend vers le camp de base, puis c’est le retour à la Paz, fatigué, puant, mais avec de jolis souvenirs, et on se dit que pour vivre des aventures comme ça, ça vaut le coup de toujours aller vers l’infini, et au-delà.

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